Combattre les trafics de drogues

Publié le par Vincent Sévigné

 

Il faut d’abord avoir les idées claires sur la situation et les objectifs poursuivis. On peut trouver un aperçu de l’état actuel pages194 et suivantes du livre « L’archipel français » de Jérôme Fourquet ; deux chiffres : il y aurait environ 1,4 million de consommateurs réguliers de cannabis dont 700 000 quotidiens ; et la progression continue. Face à cette banalisation, le gouvernement, à juste titre, a considérablement allégé les sanctions.

 

Le danger est double ; d’une part, l’addiction aux drogues pose un grave problème de santé publique ; la pente est savonneuse pour consommer de plus en plus et des drogues de plus en plus dures ; par ailleurs, des substituts dangereux, car de mauvaise qualité, sont mis sur le marché. D’autre part, toute une partie de la population française ne survit économiquement que grâce au marché parallèle du trafic de la drogue ; il en résulte des zones de non-droit où la violence s’impose ; même les médecins ou les pompiers se font agresser ; de plus, les terroristes qui sont passés à l’action sont souvent d’anciens dealers.

 

Selon moi, il faut bien distinguer ces deux périls et les traiter différemment ; on ne peut pas éradiquer brutalement l’usage des drogues ; la seule voie raisonnable est de s’orienter vers des campagnes d’information et de prévention vigoureuses pour en dénoncer les dangers ; c’est ce qui a été fait pour l’abus d’alcool ; cela a demandé de nombreuses années mais le résultat global est convaincant.

 

L’engrenage de la violence est d’une autre nature ; la situation est exactement la même que lors de la Prohibition (de l’alcool) aux États-Unis ; selon moi, la seule solution est donc de « supprimer la prohibition », c’est-à-dire d’autoriser la vente de drogues mais en le faisant intelligemment. Je l’ai dit il y a longtemps et cela commence à se pratiquer ici ou là ; il peut même y avoir un usage thérapeutique de certaines drogues.

 

Alors, faut-il ouvrir complètement les vannes ? Non, surtout pas. Selon moi, il faut autoriser des magasins volontaires, par exemple des bureaux de tabac, à vendre de la drogue taxée et contrôlée par l’État ; le prix devrait en être concurrentiel par rapport aux circuits parallèles. Chaque consommateur « officiel » doit disposer d’une carte et toujours s’approvisionner dans le même établissement ; il lui serait interdit de proposer cette drogue à d’autres ; cette drogue devrait être marquée pour permettre les contrôles. Une fois que la France disposera d’un maillage suffisant de telles officines, la vente par les circuits parallèles pourra être interdite. Attention : la vente de drogues est tellement lucrative qu’il est parfaitement inutile de s’attaquer aux dealers ; ceux qui seront arrêtés seront immédiatement remplacés ; ce sont les consommateurs qu’il faut sanctionner ; une taxe suffit ; cette taxe doit être, à peu près, proportionnelle à la fortune du consommateur, ou de celui qui le finance, et doublée à chaque récidive ; au début, ce système fera quelques vagues mais, bien expliqué, il aura le soutien « moral » de l’ensemble de la population française et, aujourd’hui, c’est la clef de la réussite de toute réforme.

 

Évidemment, il faut, « en même temps », créer du travail pour les habitants des banlieues défavorisées ; ceci est un problème d’une autre nature.

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