Nullissime !

Publié le par Vincent Sévigné

Jamais un débat pour une finale de la présidentielle n'a été aussi nul. Deux gamins se disputant dans une cours d'école. Ce débat a un vainqueur, selon moi incontestable, l'abstention.

 

En ce qui concerne monsieur Macron, je n'ai pas été déçu car je ne m'attendais pas à mieux. Monsieur Macron a passé les trois quarts de son temps à insulter madame Le Pen : à court terme, c'était peut-être une bonne stratégie car cela lui évitait d'expliciter l'indigence de son propre programme. Par contre, je pense que ce fut une erreur pour la préparation des législatives.

 

Monsieur Macron a-t-il perdu des voix ? Probablement pas. Son électorat a deux composantes, les naïfs et ceux qui rejettent viscéralement madame Le Pen. Monsieur Macron a su parler aux deux. A-t-il gagné des voix ? Cela m'étonnerait.

 

J'avoue que madame Le Pen m'a déçu. A-t-elle perdu des voix ? Non. Elle aussi, elle a su parler à son électorat et rappeler l'essentiel de ses propositions. A-t-elle gagné des voix ? Probablement pas, et c'est dommage pour elle. Elle a passé beaucoup trop de temps à chercher l'affrontement direct avec son adversaire au lieu d'expliciter tranquillement son propre programme qui, quoi qu'on en dise, tient aussi bien la route que celui de monsieur Macron.

 

De plus, ses attaques ont été trop limitées alors qu'il y avait tant à dire. Elle aurait pu noter que ce sont les pauvres qui ont voté pour elle au premier tour et expliquer pourquoi ils ont bien raison. Elle aurait pu faire remarquer que monsieur Macron propose soixante milliards d'économie sans préciser comment. Elle aurait pu signaler que monsieur Macron veut renforcer le pouvoir des syndicats et le compte pénibilité ce qui sera une catastrophe pour les PME. Enfin, et surtout, elle aurait dû mieux dire, plus posément, sans agressivité, que, selon elle, monsieur Macron garde le même logiciel que celui utilisé depuis plus de dix ans, en l'aggravant, et que la seule nouveauté qu'il propose est d'affirmer que lui, monsieur Macron, fera mieux parce qu'il se croit plus intelligent que ses prédécesseurs.

 

Et demain ? Pour madame Le Pen, ce n'est pas grave. On oubliera vite le débat d'hier. Elle a cinq ans pour prendre de la hauteur et se départir de ce défaut de communication que j'ai déjà signalé : cette façon de prendre le monde à témoin pour attester la débilité de l'adversaire : cela marche peut-être bien dans les meetings ; cela ne convient pas pour un débat entre deux finalistes qui, par hypothèse, se situent à un haut niveau. François Mitterrand disait : « cela ne marche pas comme ça ».

 

En ce qui concerne monsieur Macron, c'est évidemment infiniment plus grave car il va devoir, dès demain, prendre les rênes de la France. Il se prétend gaulo-mitterrandien, formule absurde tant ces deux leaders charismatiques sont à l'opposé l'un de l'autre. En vérité, c'est le Daladier des accords de Munich, c'est le Guy Mollet de « l'homme malade de l'Europe » et de la guerre d'Algérie.

Par principe, je suis contre le vote blanc mais, cette fois-ci, j'avoue que je pardonnerai facilement à ceux qui pensent qu'il est trop tôt pour adouber Marine et adoptent, en attendant mieux, cet ultime refuge.

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