Jean-Michel Blanquer est-il lucide ?

Publié le par Vincent Sévigné

Comme la plupart des commentateurs, j’ai applaudi aux premières mesures de notre nouveau ministre de l’Éducation nationale ; il a eu le courage, car ce fut du courage, d’annuler la plupart des dispositions de nos Diafoirus de la gauche bobo. Mais, j’ai, « en même temps », affirmé que cela ne suffisait pas ; or, après ces premières mesures de salut public, rien n’a été fait, au contraire.

 

Selon moi, le domaine où la méthode Blanquer est la plus catastrophique est celui de la discipline à l’école ; toujours selon moi, il n’y a pas d’ordre républicain sans sanctions adaptées, y compris dans les cours de récréation et, a fortiori, dans les salles de classe. J’ai dit, depuis longtemps, que les élèves agitateurs pouvaient avoir un fort potentiel de leader ou de « dynamiseur », mais qu’il ne fallait pas les laisser perturber un établissement : il faut les regrouper dans des classes, ou des institutions, adaptées à leur profil, même si cela doit être perçu comme une sanction imposée.

 

Or, la technique Blanquer est exactement à l’opposé de cette sévérité institutionnalisée ; il est vrai que monsieur Blanquer n’est qu’un élément représentatif de quasiment toute l’administration de l’éducation nationale. Le « Canard enchaîné » lui-même, pourtant peu porté vers la « dictature », reconnaît (page 3 de l’édition du mercredi 31 octobre) qu’il y a une sérieuse divergence entre les enseignants et leur hiérarchie administrative. Cette dernière a toujours prôné, et le fait encore, un « cadre bienveillant » qui favorise « une approche positive de l’estime de soi des élèves ». En clair, le bon enseignant est celui qui ferme les yeux sur les pires dérives alors que le lanceur d’alerte est un enquiquineur (pour rester poli) qui doit être sanctionné, au moins en ce qui concerne sa note administrative : ceci explique d’ailleurs le refus, justifié, des syndicats devant toute rémunération « au mérite » des enseignants.

 

Mais le « principe de réalité » fonctionne aussi bien dans l’éducation qu’ailleurs. À force de dire à nos petits qu’ils méritent toute notre disponibilité, on en fait des tyrans ; en grandissant, au mieux, ils brûlent les voitures dans les banlieues ; cet exemple entraîne les plus jeunes qui ne voient pas pourquoi ils ne feraient pas à l’école ce qui est devenu la règle dans certaines cités. Bref, l’éducation Blanquer et consorts récolte ce qu’elle a semé. On est arrivé, aujourd’hui, à un sérieux virage ; la susdite éducation est tellement débordée qu’elle fait appel à la police : avant mai 68, cette intrusion eut été considérée comme un sacrilège. Faudra-t-il qu’éclatent des scandales de pédophilie pour que l’on comprenne, enfin, que la « tendresse » ne suffit pas et qu’il n’y a pas d’éducation sans sanctions appropriées.

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