Le projet El Khomri

Publié le par Vincent Sévigné

Le projet de loi El Khomri est un test intéressant. Rappelons que ce projet de loi qui sera présenté en conseil des ministres le 24 mars porte sur certaines adaptations du code du travail, notamment en matière de licenciements.

Est-ce un outil efficace pour diminuer le chômage ? Non. Du moins, pas à lui seul. Par contre, c'est une étape indispensable pour libérer, un peu, les entrepreneurs. Mais l'intérêt essentiel de ce projet, et peut-être même son premier objectif, est d'abord d'obliger chacun à dévoiler une partie de son programme économique.

La réaction de la gauche du parti socialiste est claire. Non seulement le rejet est absolu mais ce ballon d'essai est considéré comme un point de rupture. Même Martine Aubry est montée au créneau pour soutenir les « frondeurs ». Ceci était prévisible, et donc, probablement, souhaité par l'exécutif : cela clarifie les positions.

Je dois avouer que j'ai été un peu surpris par la réaction de Nicolas Dupont-Aignan et par celle de Florian Philippot : condamner vigoureusement une ébauche de texte, dans un domaine où il faut impérativement apporter un peu d'air, me semble une erreur politique. Les Français ne sont pas des imbéciles et ils sauront bien juger la crédibilité des programmes que défendront les candidats. Il y a suffisamment de points où le Front national peut valablement contester la droite pour ne pas s'opposer, a priori, aux amorces de réformes indispensables. Marine a encore le temps de redresser la barre et, si elle le juge utile, de trouver un prétexte pour condamner la loi finale.

Après une première réaction négative épidermique, Alain Juppé a été beaucoup plus astucieux en affirmant qu'il soutiendrait ce texte « en l'état ».

Laurent Berger, patron de la CFDT, a fait part de son désaccord : c'est de bonne guerre. Il a tout intérêt à mettre d'emblée la barre le plus haut possible, avant de négocier. D'ailleurs, le gouvernement l'a bien compris et a aussitôt fait droit à la requête la plus facile à satisfaire, à savoir une présentation en conseil des ministres reportée du 9 au 24 mars. C'est presque à se demander si cette première scène (de la pièce de théâtre) n'était pas convenue à l'avance.

Mais le plus intéressant va être la suite. La base « gauchiste » va-t-elle trouver là l'étincelle pour embraser la rue ? Comment vont se situer les députés, qu'ils soient socialistes modérés ou républicains ? Ce futur marathon de nos élus créera-t-il une opportunité pour faire surgir une alliance implicite entre centre gauche et centre droit ? Manuel Valls va-t-il réussir à accrocher un accord de la CFDT sur un compromis plus favorable aux travailleurs ?

Tout cela promet d'être beaucoup plus significatif et beaucoup plus utile que les débats stériles sur la déchéance de nationalité. Affaire à suivre.

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